(traduit par Henry Quinson)
La première fois que je me suis mis à écrire
pour le plaisir était à mon retour d'un périple
en URSS en 1969. Je m'étais offert ce voyage pour fêter
mon MBA obtenu à l'Université de Chicago.
J'étais devenu fasciné par la culture
soviétique, la diversité des gens là-bas, leur
gentillesse à l'égard des Américains, et leur
grande connaissance de notre littérature. L'absence
complète de mentalité commerciale était à
la fois rafraîchissante et parfois frustrante, surtout dans les
restaurants. Mes observations sur tout, des jeux que pratiquent les
Russes à la plage jusqu'à leur habitude de commencer le
petit-déjeuner par un verre de vodka ou de cognac furent
consignées dans un journal que je lus à mes amis :
c'était mes inédites Réminiscences
russes. Je voulais d'une manière ou d'une autre
intégrer la Russie dans mon parcours professionnel.
Ma découverte et mon intérêt pour la Russie
furent suivis d'un détour. Les Etats-Unis étaient en
proie à de violentes manifestations contre la
ségrégation raciale, et la guerre du Vietnam avait
plongé le pays dans le chaos. L'Université de Chicago
était au coeur de l'agitation. Je décidais de m'engager
dans le combat sur place avant de me lancer dans des aventures
à l'étranger. Le programme des " cités
modèles " de l'agence fédérale du Logement et du
Développement urbain me permit de me mettre au service de mon
pays. Cette agence gouvernementale octroyait une assistance
financière substantielle aux villes qui demandaient de l'aide,
et m'envoya à Tuskegee, dans l'Alabama. Après avoir
consacré deux années au programme des cités
modèles à Tuskegee, je suis renté à
Chicago pour "faire du conseil" en m'appuyant sur ma vaste
connaissance des réalités du terrain quant à
l'octroi des subventions fédérales.
Puis, ma sirène russe se rappela à mon bon souvenir.
Je suis rentré à Washington où je m'étais
installé après mes études de finances.
J'étudiais le russe et je me mis à écrire des
articles enflammés pour Foreign Policy Magazine expliquant que les Russes possédaient de la haute technologie
et que les entreprises américaines l'achetaient.
Le ministère des Affaires étrangères
américain me demanda de mener une enquête et
d'expliquer, preuves à l'appuis, ce phénomène de
" flux technologique inversé " en provenance de l'URSS et de
l'Europe de l'Est. Pendant quatre ans, j'ai mené la vie d'un
détective, obtenant de nombreux entretiens, et j'ai finalement
rédigé un rapport qui fournissait la première
étude globale des flux technologiques du bloc
soviétique vers les Etats-Unis, principalement sous forme de
droits de propriété intellectuelle : brevets et secrets
commerciaux. En 1980, je fondais Kiser Research Inc pour
sonder les secrets commerciaux du bloc communiste. Nous avons
aidé l'industrie américaine à trouver en Russie
et en Europe de l'Est de meilleures technologies à moindre
coût, et nous avons joué le rôle de facilitateurs
dans ce processus. Mais je n'ai jamais été un fanatique
de nouvelles technologies ; ce qui m'attirait avant tout,
c'était l'inconnu. Je ne suis pas vraiment un mordu de
technologies industrielles, mais plutôt un étudiant en
sciences sociales intéressé par l'histoire et les
langues (BA d'histoire à l'Université de Caroline du
Nord ; MA d'histoire à l'Université de Columbia).
J'aime jeter des ponts entre différentes cultures et
sous-cultures. Mon premier livre, Communist Entrepreneurs,
expliquait comment des esprits créatifs finissaient par se
distinguer dans le système communiste, dont les carences
stimulaient souvent l'innovation.
Après quinze ans de cette vie trop remplie de voyages,
j'avais besoin d'une pause, et mon épouse aussi. En 1994, je
suis allé habiter à Saint-Paul de Vence, avec Linda et
mes deux enfants, pour une année de ressourcement dans la
culture française, objet d'un livre encore inédit.
Cette année sabbatique m'a conduit à changer mon style
de vie. J'ai laissé la responsabilité de Kiser
Research à mes collègues et j'ai, depuis lors,
concentré l'essentiel de mon temps à écrire.
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