Cheikh Khaled Bentounès

Guide spirituel de la Tariqa Alawiya

«L'islam est devenu une réalité incontournable»

  

  Propos recueillis par Alain Boudre, Nouvelle Cité, février 2002

 

De passage à Paris, le Cheikh Bentounès, guide spirituel de la Tariqa Alawiya - mais encore président-fondateur des Scouts Musulmans de France - a bien voulu faire le point avec nous sur des sujets d'actualité liés à l'islam.

 

NOUVELLE CITÉ: La vie spirituelle et le dialogue avec les autres croyants sont deux aspects particulièrement importants dans la vie des membres de votre confrérie.

CHEIKH BENTOUNÈS: Absolument! Une des particularités de notre confrérie, la Tariqa Alawiya, d'inspiration soufie, est d'ouvrir au dialogue avec l'ensemble de la communauté humaine. L'une des premières choses à laquelle l'adepte est initié, c'est l'humilité. Il s'agit de ne pas se dire «C'est moi qui détiens la vérité» mais de l'approcher avec humilité. La deuxième chose, c'est la fraternité universelle adamique (ndlr: qui nous vient d'Adam), et la troisième, c'est la sincérité avec l'ensemble de la société. Le dialogue fait donc partie de notre enseignement. De plus, il existe un concept très simple dans la Tariqa, qui veut que j'existe aussi par l'autre : l'autre m'est nécessaire, pour que moi-même je puisse m'identifier, me connaître et connaître ma tradition. Sans lui, je n'existerais pas. Ali, le gendre du prophète lui-même - qui est pour les soufis le premier chaînon initiatique - disait toujours: «Allez vers vos amis, ils vous montreront vos qualités et allez vers vos ennemis, ils vous montreront vos défauts». Nous avons besoin les uns des autres. Même de celui qui ne pense pas comme nous. Celui qui est différent nous permet en quelque sorte de nous rendre compte de qui nous sommes.

 

«Nous sommes allés trop loin dans l'ignorance réciproque»

NOUVELLE CITÉ: Parmi les livres qui connaissent un fort succès actuellement, beaucoup sont liés aux événements du 11 septembre 2001, à la connaissance du Coran et de l'islam. Quelles réflexions vous inspirent cette soif de connaître et comprendre votre religion?

CHEIKH BENTOUNÈS: Il faut aujourd'hui prendre en considération que l'islam est universellement présent. Désormais la Terre est un village où les gens découvrent à la fois qu'ils sont différents et qu'ils habitent le même quartier. Cet engouement pour l'islam aujourd'hui vient de ce que longtemps il a été perçu comme quelque chose de lointain. Maintenant, on s'aperçoit qu'il est bien présent en Europe Occidentale. Cette présence constitue pour beaucoup un grand point d'interrogation. Qui sont les musulmans? Qu'est ce que l'islam? Quel est son message? Surtout quand l'actualité se fait brûlante avec les événements du 11 septembre 2001, les problèmes dans les banlieues, la question de la Palestine, etc. On découvre d'un seul coup que l'Islam est une réalité incontournable qui compte dans le monde d'aujourd'hui et surtout de demain.

NOUVELLE CITÉ: Pensez-vous que l'on assiste à un «choc des civilisations»?

CHEIKH BENTOUNÈS : Non, il s'agit plutôt d'un choc de l'incompréhension et de l'ignorance. Un choc qui va permettre - je l'espère - aux musulmans de mieux connaître l'islam - parce que les autres leur en renvoient une certaine image tel un miroir - et aux non-musulmans d'en découvrir l'universalisme et les valeurs humaines. Il nous faut découvrir un dénominateur commun pour bâtir ensemble l'avenir. On assiste à un engouement pour l'islam malgré tout ce qui arrive, alors que cela aurait pu nous mener vers un affrontement. Nous découvrons soudain que nous sommes allés trop loin dans l'ignorance l'un de l'autre. Nous avons tous intérêt à mieux nous connaître car nos différences sont des richesses pour l'ensemble de la communauté.

 

Les musulmans: des citoyens à part entière

NOUVELLE CITÉ: L'islam en France est en pleine mutation. Comment définiriez-vous la situation actuelle?

CHEIKH BENTOUNÈS: Je dirais que nous sommes à la croisée des chemins d'autant que l'islam est présent aujourd'hui partout en Europe au point d'en être la deuxième religion. L'avenir dépend beaucoup - mais pas uniquement - de l'ouverture de la communauté musulmane et de sa participation active dans la société. Il très important qu'elle se détermine et joue pleinement son rôle en tant que communauté faite de citoyens à part entière pour contribuer à la prospérité, à la paix, à l'entraide, à la richesse culturelle et spirituelle du pays où elle vit, surtout quand il s'agit d'un pays laïc qui permet cela comme la France. Cela signifie que les musulmans doivent être considérés comme des citoyens à part entière - et non à part... - notamment au niveau des droits (droit à des mosquées et à des lieux de prières décents, à une éducation, etc).

NOUVELLE CITÉ: Le gouvernement a mis en place un processus de consultation des musulmans de France auquel vous êtes associé. Quelle évolution souhaitez-vous à ce processus qui contraint les musulmans de diverses obédiences à se rapprocher?

CHEIKH BENTOUNÈS: Cette consultation, qui a débuté il y a deux ans, a accompli un travail considérable de rapprochement entre les différents courants musulmans. C'est quelque chose de nouveau pour la communauté musulmane que toutes les sensibilités soient représentées autour d'une même table de discussion. Il s'agit d'un travail de longue haleine, sans précipitation. Il faut inciter les musulmans à se rencontrer, à dialoguer, parce qu'ils n'y sont pas habitués et qu'il y a différentes sensibilités, différents pays dont certains interviennent dans le débat indirectement par le biais d'associations ou de personnes. Les pouvoirs publics nous ont donné le temps en nous aidant à travailler en profondeur sur les problématiques en France (statuts des imams, enseignement, représentation des musulmans, etc).

La France a été découpée en huit régions selon la population musulmane et chacune élira des délégués qui, à leur tour éliront des délégués nationaux qui composeront l'assemblée du conseil français du culte musulman. J'ai une grande espérance dans cette clarification qui donnera une plus grande visibilité à l'islam qui y gagnera aussi une certaine unité, ce qui lui a toujours manqué et a suscité des problèmes chez les musulmans comme chez les autres. Il ne faut pas oublier que cette consultation représentera le culte musulman, et non les musulmans français qui, comme tous les citoyens, sont représentés par leurs élus.

 

«Votre quartier, c'est votre Palestine, votre Afghanistan!»

NOUVELLE CITÉ: Vous êtes venu à Paris notamment pour intervenir auprès des jeunes générations issues de l'immigration et en lien avec l'Islam. Quel est votre apport aujourd'hui dans la problématique des banlieues?

CHEIKH BENTOUNÈS: Le problème des banlieues - qui est complexe - n'est pas lié directement à l'islam, parce que souvent ces jeunes-là ignorent beaucoup plus l'islam qu'on ne le croit. Ils se réfèrent plutôt à l'actualité et se marginalisent pour nous transmettre un message: ils n'admettent pas la société telle qu'elle est aujourd'hui. Que vous alliez à Alger, Rio de Janeiro ou Paris, le problème est mondial. Les jeunes ne se reconnaissent pas dans cette société qui n'a plus d'idéal et qui est basée sur l'argent et le bien-être matériel. A tous ceux qui sont tentés par un repli vers le religieux ou autre, je dis : «Commencez par prendre conscience qu'il est fondamentalement bon d'oeuvrer pour le bien, non par morale religieuse ou philosophique mais par nécessité parce que faire le bien nous amène à vivre la paix. Agissez au niveau de votre quartier, c'est votre Palestine, votre Afghanistan... Quand vous voyez quelqu'un qui dégrade, allez vers lui, raisonnez-le. Qu'il règne dans votre quartier, cité, immeuble ou association, une atmosphère de fraternité, d'humanité, d'entraide, de bonté. Agissez volontairement dans le sens du bien et ne rejetez pas la faute sur l'autre. Soyez dignes. Pour être respectés, respectez les autres. Sachez que l'islam, c'est d'abord un comportement. Ce n'est pas que par la prière ou les autres obligations rituelles qu'on est musulman, car cela est du domaine individuel entre l'homme et Dieu. L'islam juge l'être humain sur son comportement. C'est pourquoi le Prophète disait: "Le musulman, c'est celui dont on ne craint ni la main ni la langue".»

 

 

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